De tous les anciens
calendriers du monde, ceux de la civilisation maya et des
autres civilisations méso-américaines sont les
plus complexes et les plus précis. Les calculs de la
concordance entre les cycles mayas de 260 jours et de 365
jours donnent, dans les tropiques, des résultats
presque identiques à ceux de l'année solaire
actuelle, la marge d'erreur n'étant que de 19
minutes.
Les prêtres-astronomes mayas cherchaient des signes
dans les cieux. Pour tracer les mouvements complexes du
soleil, des étoiles et des planètes, ils
avaient construit des observatoires et des gnomons mesurant
les ombres portées et ils observaient l'horizon;
à partir de ces observations, ils faisaient de
savants calculs et les notaient dans leurs chroniques ou
«codex». Ils dressaient ensuite des calendriers
pour consigner le mouvement des astres et le passage du
temps. Les Mayas tenaient aussi des registres
détaillés des phases de la lune sans toutefois
consigner officiellement ces données dans un
calendrier lunaire.
Dans les cités mayas, les édifices
cérémoniels étaient rigoureusement
alignés sur la direction de compas. Au moment des
équinoxes du printemps et de l'automne, par exemple,
les rayons du soleil pénétraient par les
meurtrières d'un observatoire maya, éclairant
ses murailles intérieures.
Le principe de l'alignement était aussi
appliqué à l'extérieur des temples et
des palais. L'exemple le plus connu se trouve à
Chichén Itzá, la principale ville maya de la
péninsule du Yucatán. Depuis des
siècles, une foule s'y rassemble chaque année
pour observer la magie du soleil illuminant les marches
d'une pyramide dédiée à Quetzalcoatl,
dieu incarné sous les traits d'un serpent à
plumes. Lors des équinoxes vernales et automnales, le
soleil illumine graduellement les marches et la tête
du reptile au bas de l'escalier de la pyramide, un jeu de
lumière donnant vie au serpent qui semble onduler du
haut de la montagne sacrée en direction de la
Terre.
Pourquoi donc les Mayas se donnaient-ils tant de mal pour
aligner leurs places et leurs temples
cérémoniels sur le soleil et les
étoiles? En partie, sans doute, pour rendre hommage
aux dieux. La tombe de Pacal à Palenque, par exemple,
est alignée sur le Soleil. Au solstice d'hiver, le
Soleil se couche derrière la haute corniche qui se
profile derrière la pyramide de Pacal, au centre de
la voûte du temple. Pas à pas, le Soleil
s'avance dans le ciel, pénètre dans le Temple
des Inscriptions, en éclaire le mur du fond puis,
dans sa course vers l'horizon, il semble descendre les
marches du temple pour se poser sur la tombe. La mort de
Pacal et son entrée dans le monde souterrain font
écho, par l'alignement de son tombeau, à la
mort du Soleil et à sa plongée dans l'univers
des ténèbres.
Les Mayas ont construit des observatoires dans bon nombre de
leurs villes et ils ont aligné d'importantes
structures sur les mouvements des corps célestes. Ce
sont parfois des groupements de temples, comme les trois que
l'on voit à Uaxactún, qui marquent la position
du Soleil levant au moment du solstice d'été,
des deux équinoxes et du solstice d'hiver. Le type
d'architecture que l'on trouve comme le Caracol, à
Chichén Itzá, est aussi fonction de
l'apparition des corps célestes comme les
Pléiades et Vénus. Un des temples d'Uxmal
renferme des centaines de symboles vénusiens.
Métaphores astronomiques et événements
célestes définissaient le paysage rituel des
chefs mayas. Les transferts du pouvoir royal, par exemple,
semblent, dans certains centres, s'être
opérés au moment du solstice
d'été. À Palenque, on peut lire sur une
inscription que le fils de Pacal, Chan-Bahlum, a
inauguré le complexe du temple de la Croix le 23
juillet 690 - lors de la conjonction de Jupiter, de Saturne,
de Mars et de la Lune. Aux yeux des Mayas, cet
événement peut avoir représenté
la naissance primordiale des trois divinités
ancestrales de la dynastie palenque de la Mère
originale (la Lune) et leur être apparu comme
l'occasion rêvée de dédier un monument
à leur accession au pouvoir.
Des chefs mayas, sculptés ou peints sur des peintures
murales, arborent des symboles des cieux, notamment une
ceinture ou un diadème figurant une suite de symboles
liés à la Lune, au Soleil, à
Vénus, au jour, à la nuit et au ciel. On les
voit aussi transportant des barres ornées comme des
diadèmes pour indiquer qu'ils avaient un mandat du
ciel ou encore assis, entourés d'une auréole
leur conférant un pouvoir céleste. Les chefs
s'associaient aussi volontiers aux divinités
bénéfiques comme le Dieu du Soleil et, tout
comme les prêtres, ils aimaient se «vêtir
des cieux» s'enveloppant d'une peau de jaguar dont les
mouchetures scintillaient comme les étoiles du
firmament.
Les Mayas croyaient aussi que les mouvements du Soleil et de
la Lune étaient, à chaque étape de leur
trajectoire, guidés par les dieux. À leurs
yeux, le Soleil et la Lune, au plus profond des
ténèbres de la nuit, continuaient à
voyager dans l'univers souterrain, sous la menace de
divinités maléfiques qui voulaient freiner
leur élan. De là à croire que les corps
célestes avaient grand besoin des hommes et de leurs
rites sacrés comme l'automutilation, la torture et le
sacrifice humain, il n'y avait qu'un pas. Il s'agissait pour
eux simplement du prix à payer pour la survie de
l'univers. La mort devenait dès lors un
privilège conférant l'immortalité aux
disparus ou à ceux qui s'offraient en holocauste.
Les cycles répétitifs de la création et
de la destruction que décrit la mythologie maya
servaient à rappeler aux humains l'importance de
leurs obligations envers les dieux qui assuraient la
survivance de l'humanité et le prix à payer
pour leurs manquements. D'après le calendrier
sacré des Mayas, chaque période de 52 ans
ramenait la menace de la destruction de l'univers. Les
divinités et les autres forces de la création
et du chaos se livraient alors dans l'univers des mortels
une bataille sans merci déterminant le sort de
chacune des créatures de ce monde.
La planète Vénus avait une signification
particulière pour les Mayas et Quetzalcoatl, par
exemple, est actuellement identifié à
Vénus. Le codex de Dresde, une des quatre chroniques
mayas épargnées, renferme aussi un
relevé détaillé des apparitions de
Vénus et il servait à prédire l'avenir.
La guerre elle-même était
déclenchée sur ordre du ciel, encore une fois
par la planète Vénus. On peut voir sur les
stèles et autres sculptures les insignes de guerre de
Vénus tandis que les raids et les captures
étaient réglés d'après ses
apparitions, surtout sous forme de
l'«étoile» du soir. Dans toute la
Méso-Amérique, l'art de la guerre était
souvent réglé sur les mouvements de
Vénus.
La mythologie, l'astrologie et les calendriers mayas
étaient intégrés dans un système
de croyance unique. Les Mayas observaient le ciel et les
calendriers pour prédire les éclipses solaires
et lunaires, les cycles de la planète Vénus et
les mouvements des constellations. Ces
phénomènes n'étaient pas perçus
comme des mouvements mécaniques mais comme des actes
des divinités - des événements
mythiques se reproduisant depuis la Création.
Il existe encore dans les régions mayas aujourd'hui
des prêtres du calendrier qui font le comput du cycle
sacré de 260 jours pour les actes de divination et
autres activités chamanistiques. De nombreux
éléments de ce système de croyance
provenaient du ciel, mais des prêtres-astronomes
intervenaient sur terre pour superposer la structure
sacrée du cosmos aux activités du monde
terrestre.
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